Conférence Nationale Humanitaire 2016
Le bilan du Collectif Haïti de France
La 3e Conférence Nationale Humanitaire s’est déroulée à Paris le 23 février dernier, organisée par le Centre de crise du Ministère des Affaires étrangères. Elle a permis de rassembler un grand nombre d’acteurs de l’humanitaire et de l’aide au développement, en vue de préparer le premier Sommet Mondial Humanitaire qui aura lieu les 23 et 24 mai prochains à Istanbul.
Les débats se sont articulés autour de plusieurs questions majeures, à savoir les perspectives d’évolution de l’aide humanitaire vis-à-vis des objectifs de développement durable de 2030, la question du partenariat et de la place des ONG locales dans le processus de l’aide, mais aussi l’articulation entre les acteurs de l’humanitaire et de l’aide au développement au sein des crises actuelles.
Le conflit syrien et sa répercussion en Europe, ou encore les bouleversements climatiques au Népal et en Haïti, sont autant de problématiques qui ont pu être abordées. Les crises liées aux nouvelles formes de conflits mais aussi aux conséquences du réchauffement planétaire ont causé 60 millions de réfugiés et de déplacés en 2014. L’évolution des enjeux de la coopération internationale, qui ne nécessitent pas nécessairement une aide d’urgence, redéfinit les contours de l’aide internationale. Les intervenants ont mis l’accent sur l’importance du rôle des structures locales dans la gestion de ces crises et de la complémentarité nécessaire entre les instances locales et internationales.
Cette notion d’interdépendance a également été évoqué concernant l’articulation des rapports entre acteurs de l’urgence et acteurs du développement. Le système actuel n’est plus adapté aux crises majeures et doit évoluer pour permettre à ces différents de mieux travailler ensemble par la complémentarité des savoirs faire et des financements, tout en incluant la société civile locale dont la place est primordiale. Des pistes de réflexions concernant l‘importance de la résilience des acteurs nationaux par le renforcement des capacités, la mise en place de canaux de financements directs pour les structures locales ont été évoquées, l’objectif 2030 étant d’allouer 10% des fonds des organisations internationales aux instances locales, contre seulement 2% aujourd’hui.
Cependant, tous ces objectifs doivent se conjuguer à différents problèmes : l’insécurité grandissante à laquelle font face les travailleurs de l’aide et de la solidarité internationale, le manque de gouvernance du système de l’humanitaire qui opère une approche encore trop sectorielle et trop éloignée des réalités du terrain. A cela s’ajoutent les obstacles administratifs imposés par les bailleurs qui constituent une difficulté majeure pour l’implication et l’autonomie financière des organisations locales.
La place de la société civile a également été mise en évidence à travers des problématiques plus spécifiques telles que la responsabilité des médias dans la priorisation de la répartition des fonds par les bailleurs, l’engagement citoyen dans la solidarité internationale et la mobilisation de la société civile face au manque d’implication des politiques.
Cette 3e Conférence Nationale Humanitaire a donc permis d’avoir une vision globale des enjeux et de se concerter ensemble sur les solutions à apporter. Toutefois, on peut regretter le manque de propositions concrètes et l’absence de discussions approfondies sur la question du droit international humanitaire et du rôle des États, en lien direct avec beaucoup de problèmes exposés.
La présence du Collectif Haïti de France à cette conférence a permis de consolider sa vision de la solidarité internationale et ses valeurs de partenariats et de développement face au paysage de l’aide humanitaire. Notre vision de l’aide au développement, basée sur un partenariat durable et effectif avec les structures locales, a été valorisée tout au long de la journée lors des différentes interventions. La nécessité d’un développement sur le long terme qui inclut largement les acteurs locaux était au centre des considérations. Il a été soulevé le problème de la lourdeur des procédures administratives de demandes de financements par de grandes ONGs d’urgence, difficultés qui deviennent encore plus importante pour des petites associations comme celles de notre réseau et leurs partenaires en Haïti. Il est donc urgent de demander à ce que l’accès à ces financements leur soient facilité. Le Collectif Haïti de France tient à valoriser la richesse de son réseau d’acteurs du développement et de la solidarité internationale en plaidant pour leur reconnaissance au sein du paysage humanitaire.
En espérant que ces réflexions trouveront une concrétisation lors du Sommet Mondial Humanitaire et permettront aux acteurs de la solidarité internationale de voir leurs travaux légitimés et facilités.