Note de presse

Le droit à l’éducation, un idéal à atteindre en Haïti

L’éducation fait partie des droits fondamentaux de l’homme. C’est un droit qui vise au plein épanouissement de la personnalité humaine, il est protégé et garanti par la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme (art. 26) et la Constitution Haïtienne (art.32, 32.1, 32.2, 32.3). L’Etat a pour devoir d’assurer non seulement de sa jouissance, mais aussi de sa gratuité au niveau primaire dans et dans les conditions exigées par la loi.

Néanmoins, à l’heure de la rentrée scolaire 2009-2010, la jouissance du droit à l’éducation pour la population haïtienne reste encore un idéal à atteindre.
Beaucoup de parents haïtiens n’ont pas un revenu suffisant leur permettant de se conformer aux exigences de certaines institutions scolaires. 80% d’entre elles sont laissées à la charge du secteur privé. Les frais de scolarité et des matériels scolaires exigés ne sont pas à la portée de tous les parents, tandis que l’accès dans les écoles publiques demeure très difficile. Certains d’entre eux dont les moyens sont déjà très limités, se trouvent dans l’obligation de soudoyer certaines personnes pour s’y assurer une place. Alors que bon nombre d’entre eux ont déjà plusieurs enfants à leur charge.
Certains professeurs, qui ont passé des mois et même des années à enseigner, ont jusqu’ici du mal à recevoir leur salaire. Si le gouvernement ne gère pas ce dossier avec célérité et à la satisfaction des parties concernées, la rentrée scolaire risque d’être paralysée dans certains endroits du pays.
Les problèmes auxquels font face certaines entités de l’UEH sont révélateurs d’un malaise social profond, qui doit nous interpeller tous. L’intervention policière dans l’enceinte de la faculté de médecine est malvenue. Elle risque d’attiser la colère des étudiants protestataires, de pousser au durcissement la position de la coalition des associations d’étudiants, geler le dialogue prôné et de perturber la prochaine rentrée universitaire.
Paradoxalement, les prix de certains produits de première nécessité ainsi que les produits pétroliers ne font qu’augmenter sur les marchés locaux. Ce qui rend encore plus compliquée la situation, déjà extrêmement douloureuse qui bouscule beaucoup de familles haïtiennes. Elles éprouvent donc des difficultés énormes et se sacrifient pour permettre à leurs enfants de se rendre à l’école. De plus, certaines écoles qui ont été endommagées ou détruites durant le passage des ouragans, ne sont toujours pas reconstruites ni même restaurées. De ce fait la rentrée scolaire demeure jusqu’à présent incertaine pour la majorité de la population.
A coté de toutes ces difficultés auxquelles sont confrontés les parents haïtiens dans le cadre de l’éducation de leurs enfants, beaucoup d’irrégularités sont aussi à déplorer dans le fonctionnement de certaines institutions scolaires. Elles ne répondent pas aux normes les plus élémentaires. Elles sont pour la plupart délabrées ou logées dans des établissements qui n’ont pas été construits à cet effet. Leur capacité d’accueil est nettement inférieure par rapport à leur effectif. Tout cela avait été à l’origine de l’effondrement de plusieurs établissements scolaires en 2008. Le plus tragique d’entre eux a été celui du collège « La Promesse Evangélique de Nerrette » qui avait fait pas mal de victimes : 95 morts et 150 blessés. Ceci avait poussé les autorités de l’Etat à adopter certaines mesures de manière à proscrire le fonctionnement des institutions où la sécurité des élèves se révèle incertaine. Ces mesures qui n’étaient que conjoncturelles sont restées sans suivi. Dans la réalité, rien n’a été entrepris de façon à réparer les victimes de cet incident regrettable.
Non seulement l’éducation en Haïti ne constitue pas une priorité pour l’Etat Haïtien, mais elle échappe également à son contrôle. Aussi, ne s’apparente-t-elle pas à un supplice pour les élèves haïtiens en quête de savoir. Car, le forfait perpétré, le 24 août 2009 par le policier Jean Erick Jean Baptiste sur l’élève Hetnon Dallus en est une preuve tangible. Dans le cas contraire, ce jeune âgé de 24 ans, ne serait pas abattu aussi froidement au moment où il tentait d’accéder à un centre d’examen. Cette situation prouve une nouvelle fois à quel point l’Etat haïtien se déresponsabilise vis-à-vis des droits à l’éducation et à la vie, cela au mépris de la Constitution Haïtienne en vigueur et de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme dont il est signataire.
Fort de tout cela, la POHDH recommande à l’Etat de:
• Mettre en œuvre une politique éducative nationale répondant aux droits sociaux prônés par la Loi mère de la République et la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme ;
• Mettre en application les articles 26 de la Déclaration Universelle des Droits Humains (DUDH) et 32 de la Constitution Haïtienne ;
• Accorder une assistance et une protection aux familles les plus démunies afin d’assurer l’éducation des enfants qu’elles ont à charge;
• Procéder à l’examen de la situation irrégulière des professeurs pour y apporter une solution;
• Travailler de manière à rendre gratuit l’enseignement primaire ;
• Construire au moins un lycée dans chaque commune au niveau du pays ;
• Procéder à l’inspection de toutes les écoles du pays;
• Sanctionner les écoles dont le fonctionnement n’est pas conforme aux critères établis par l’Education Nationale ;
• Procéder à la réparation des parents de l’élève Hetnon Dallus
• Sanctionner le policier responsable du meurtre de l’élève Hetnon Dallus;
• Procéder à la relance du dossier relatif à la tragédie de Nerrete en vue de dédommager les parents victimes ;
• Prendre en charge la scolarisation des enfants les plus pauvres du pays ;
• Au parlement de ratifier le Pacte International relatif aux Droits Economiques, Sociaux et Culturels (PIDESC) et son Protocole additionnel.

Antonal MORTIME
Secrétaire Exécutif