Les Haïtiens sont confrontés depuis quelques jours à des images d’une rare cruauté : les Unes sont de macabres mises-en-scène de corps, mutilés et filmés par des gangs armés de Port-au-Prince.

Les autres sont tournées et publiées par des policiers qui tabassent des citoyens, dont un journaliste. Haïti semble glisser « millimètre par millimètre » vers des pratiques que beaucoup croyaient révolues, s’alarme Frantz Duval, rédacteur en chef du quotidien haïtien Le Nouvelliste.

"Cela fait plusieurs mois, voire plusieurs années que des gangs des quartiers du sud de Port-au-Prince sont en guerre. Parfois c’est une guerre larvée, parfois elle est sanglante. En ce moment, les actes de représailles sont mis en scène, filmés et publiés sur les réseaux sociaux. Ce week-end on y voyait des jeunes hommes armés en train de dépecer des rivaux qu’ils avaient tués.

Cette guerre est menée pour contrôler des territoires, des marchés, des stations d’arrêt d’autobus ou encore le cimetière de Port-au-Prince. Bref : il s’agit d’obtenir le contrôle de zones qui peuvent assurer une entrée d’argent."

Il n’y a pas que la violence des gangs. Il y a aussi la violence des autorités. Avant-hier, un habitant de Pétion-Ville, âgé de 64 ans, a été ligoté les bras et les jambes derrière le dos, traîné dans la poussière, tabassé, puis, le corps ensanglanté, transporté au tribunal, puis en prison. Le tout par des policiers et en présence d’un juge de paix dans une affaire de conflit terrien.

"Tout à fait. Encore une fois la scène a été filmée par ceux-là mêmes qui commettaient ces actes de violence avant d’être publiés sur les réseaux sociaux. Ce qui signifie que les auteurs de ces actes de violence contre un citoyen, les policiers, étaient à l’aise, sûrs de ne pas être poursuivis. Nous assistons là à une banalisation de la violence, à la banalisation de la cruauté, à la banalisation de la vie en général. C’est un glissement, millimètre par millimètre vers un retour des mauvaises pratiques.

Le Premier ministre a accordé un mois au ministre de la Justice pour mener une enquête. Ce même ministre de la Justice a demandé au Conseil supérieur de la Justice de mener une enquête sur le juge de la paix qui a amené les policiers sur le terrain et qui a laissé faire les policiers quand ils ont commis des actes de violence."

 

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