Résumé du rapport

Pour la Commission Justice et Paix,
l’observation de la violence est une question de respect des personnes

Avec cette lettre ouverte, Justice et Paix vous présente son 29ième rapport sur la violence dans la zone métropolitaine, qui couvre les mois d’octobre à décembre 2008. Les Commissions Justice et Paix de la zone de Port-au-Prince saluent les efforts entrepris par la Police nationale pour créer un climat de sécurité dans le pays, d’autres efforts entrepris dans les quartiers populaires et méconnus par la grande société, mais qui permettent au pays de faire un pas.

Au mois d’octobre 2008, nous avons enregistré 50 victimes de la violence, dont 17 sont mortes par balles ; 7 victimes suite à des accidents de la route. Parmi eux, il y avait 9 femmes et 1 enfant victimes.
Au mois de novembre 2008, nous avons enregistré 148 victimes, dont 17 sont mortes par balles ; 4 par arme blanche ; 99 sont mortes quand leur école s’est effondrée sur eux ; il ait difficile d’estimer le nombre exact de garçons et de filles dans cet événement. 7 personnes sont mortes suite à des accidents de voiture, et 1 personne s’est suicidée.
Au mois de décembre 2008, il y avait 61 victimes, dont 20 par balles, 5 par arme blanche et 11 victimes d’accidents. Parmi ces victimes, nous comptons 14 femmes et 3 enfants.

Pendant ces 3 mois, dans la zone métropolitaine, nous avons constaté : Au moins 54 personnes sont mortes par balle ; 9 par arme blanche ; 25 sont victimes d’accidents (de voiture surtout) ; et au moins 99 étaient victimes lors de l’effondrement d’une école. Le drame de l’effondrement de l’école « Providence divine » ne devrait jamais être oublié, pour qu’on puisse en tirer les leçons.

Quelques considérations sur les 3 mois :
1. La prolifération des armes de poing reste une menace. Les armes illégales n’ont jamais été confisquées, et les armes en usage ne sont pas enregistrées correctement par les autorités.
2. La sécurité ne devrait être résultat d’une approche répressive en premier lieu. Les autorités doivent créer un climat au règne le respect des droits fondamentaux des personnes, où règne la justice sociale, où les gens peuvent espérer un demain meilleur pour tous et pour toutes.
3. L’absence de politique sécuritaire s’est révèle dans tout domaine. Il n’y a pas de sécurité physique, pas de sécurité alimentaire, pas de sécurité écologique, pas de sécurité judiciaire, même pas de sécurité quand on regarde la façon qu’on construit les édifices dans ou près des ravines, sur les pentes, dans les canaux, etc.
4. Les autorités doivent tirer des leçons sur la gestion de l’environnement et du territoire, et sur la sécurité pour les enfants et jeunes. Elles ont une responsabilité dans le domaine des constructions des écoles tant privées que publiques.
5. Nous constatons de graves lacunes dans les procès verbaux de la police et des juges de paix quand on récupère un cadavre dans la rue. Les indications utiles pour la justice manquent sur les causes de la mort, comme sur le lieu de l’événement.
6. Dans certains quartiers de la capitale un degré de violence règne et les groupes armés se reconstitueraient. Comme exemple : en bas de la ville, Fort Touron et Lasalines ; la zone de Martissant, Fontamara et Carrefour ; la zone de Delmas 33 et certaines zones de la Plaine. La population continue à subir de multiples formes de violence et de pression, de brigandage et de vol dans les camionnettes et même dans les maisons.

Pour quoi la Commission Justice et Paix se donne à cette observation?

1. La Commission a initié cette observation à partir d’une seule conviction: la dignité de la personne humaine et le respect que mérite le corps de chaque personne. Même le corps d’une personne assassinée dans la rue mérite un minimum de respect. La Bible nous enseigne que notre corps est le temple de l’Esprit de Dieu (1 Corinthe 6, 19).
2. Une autre raison qui motive la Commission dans ce travail est le souci de la vérité et la lutte contre les “on dit”. Le seul moyen vrai pour lutter contre les “on dit”, et d’empêcher qu’on utilise les chiffres et statistiques à des fins politiques, est de chercher à réaliser un travail d’observation directe.
3. Connaitre et songer les evenements passés, doit aider à vivre mieux le présent et construire l’avenir.
4. Finalement, la violence dans la rue de la capitale nous montre quelque chose sur la société que nous sommes en train de construire. Il révèle le fonctionnement de la police et des autorités judiciaires qui manquent de se responsabiliser sur la question.

La Commission participe à la lutte contre la violence et en faveur de la dignité de la dignité te des droits des personnes d’autres façons toujours. La Commission organise des formations sur la dignité et les droits des personnes ; elle aide les gens à mieux comprendre le sens du conflit et de les transformer sans violence; elle accompagne des démunis dans leurs problèmes avec la justice. Comme membre du Forum citoyen pour la Réforme de la justice, la Commission travaille pour permettre aux citoyens/nes de participer à la réforme de la justice et d’avancer ses propositions.

Qu’est-ce la Commission veut atteindre des autorités dans la lutte contre la violence? La Commission veut:

• Un désarmement conséquent dans le pays. Toutes les armes qui circulent dans le pays doivent être correctement enregistrées.
• Une force publique pour assurer la sécurité des personnes, qui jouit de la confiance des gens, qui est honnête, indépendante, proche des gens jusque dans les communes et sections communales.
• Justice sociale dans le pays. Cela signifie: respect pour les droits et la dignité des citoyens/nes.
• Il faut une politique agricole, basée sur le respect des producteurs et paysans.
• Devant la nouvelle saison cyclonique: un plan pour mobiliser et protéger la population dès les cyclones dévastateurs s’annonce.
• Davantage de contrôle du trafic routier et des conditions dans lesquelles on organise le transport des passagers dans le pays.
La lutte contre la violence est plus que de beaux discours.

Un dernier mot sur « violence et détention »

La Commission continue à dénoncer la violence faite sur les gens en détention dans les prisons. Leurs conditions de vie sont inhumaines. Y manque l’espace, les infrastructures, l’eau, même un lit pour se coucher. Serait-ce vraiment impossible pour l’Etat d’occuper convenablement ces 8.000 citoyens et citoyennes qui sont sous sa responsabilité directe en détention ? Où est la volonté politique des autorités pour remédier à ces situations ?

Port-au-Prince, 12 février 2009