Paru dans Mediapart

« Le changement commence en mettant fin à l’impunité ». 82 organisations (syndicats, ONG, associations, mouvements paysans, féministes, citoyens) de plusieurs pays appellent à mettre fin au silence et à la complicité internationale vis-à-vis d’Haïti. « Discrédité, contesté par une très grande majorité des Haïtien.nes […] le président Jovenel Moïse tient largement grâce au soutien des États-Unis, et à la subordination des autres pays et des instances internationales »

Depuis juillet 2018 et à de nombreuses reprises, dans un contexte de détérioration des droits et des conditions de vie, les Haïtien.nes se sont mobilisés avec force et courage contre l’appauvrissement, la corruption et l’autoritarisme. Avec pour seules réponses : la répression du gouvernement de Jovenel Moïse, l’opposition feutrée ou explicite de la « communauté » internationale.

En deux ans, la situation s’est encore aggravée, et se caractérise essentiellement par :

  • L’appauvrissement : les conditions de vie des Haïtiens, déjà précaires (59% en situation de pauvreté), n’ont cessé de se détériorer. L’inflation et la dévaluation de la monnaie locale, la confiscation des institutions et politiques publiques par une élite corrompue ont un peu plus hypothéqué l’accès aux services sociaux de base, au premier rang desquels l’éducation et la santé.

  • La corruption : la Cour Supérieure des Comptes a documenté le gaspillage et le détournement du fonds de 1,5 milliard d’euros de l’accord Petrocaribe, destinés à des projets de développement. Les hommes d’affaires haïtiens ainsi que la classe politique, dont le président Jovenel Moïse, sont mis en cause.

  • La terreur : explosion de l’insécurité, prolifération, renforcement et convergence de gangs armés. Le Bureau Intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH) a documenté 159 personnes assassinées et 92 autres blessées – y compris des enfants – entre janvier et juin 2020, en raison de la violence liée aux gangs. Ces gangs sont à l’origine d’au moins quatre massacres (le dernier, fin août-début septembre), dont le plus meurtrier est celui de La Saline, où au moins 71 personnes ont été tuées dans la nuit du 13 au 14 novembre 2018. Des enquêtes nationales et internationales ont mis en cause la responsabilité d’un ancien policier, Jimmy Chérisier, alias « Barbecue », ainsi que les liens entre les bandes armées et le pouvoir, au point d’évoquer un « massacre d’État».

  • L’impunité : le scandale Petrocaribe démontre non seulement la gravité, mais aussi le caractère systématique de la corruption, qui se nourrit et renforce l’impunité. Aucune avancée dans les enquêtes sur la corruption, les violations de droits humains et les massacres, aucun procès à l’horizon. Les enquêtes sont au point mort, les massacres demeurent impunis, et les victimes sans recours.

[Lire la totalité de l’article]