Haïti : Jocelerme Privert élu président provisoire
Jocelerme Privert, 62 ans, a été élu président provisoire d’Haïti par le Parlement, au deuxième tour du scrutin après une longue séance dans la nuit de samedi à dimanche. La situation est rarissime : c’est la première fois depuis 1946 qu’un chef de l’Etat haïtien est choisi par une élection indirecte.
Celui qui était jusqu’à samedi le président du Sénat va donc assurer la succession de Michel Martelly, qui a achevé son mandat le 7 février sans transmettre le pouvoir à un sucesseur, à cause du report sine die du second tour de la présidentielle en raison des contestations de l’opposition. Son mandat est limité à cent vingt jours, selon les termes d’un accord signé quelques heures avant la fin du mandat de M. Martelly.
Avec cette élection, Haïti signe la fin d’un vide institutionnel sans précédent. Le premier tour de scrutin, samedi, n’a pas permis de départager Jocelerme Privert d’Edgard Leblanc Fils, un ancien président du Sénat, mais le second vote, tenu après 3 heures du matin, lui a offert une large majorité sur son concurrent, avec les votes favorables de 64 députés sur 92 et de 13 des 22 sénateurs présents à la séance marathon. Dejean Belizaire, le troisième prétendant au poste de président provisoire, n’a reçu le vote que de deux députés.
Les scrutins reportés doivent se tenir dans les quatre mois
Après lecture de sa lettre de démission de son poste de sénateur, Jocelerme Privert a prêté serment sur la Constitution. Il a désormais pour mission d’achever le processus électoral qui a été interrompu en raison des larges contestations de l’opposition qui dénonçait un « coup d’état électoral » fomenté par Michel Martelly. Au premier tour du scrutin présidentiel le 25 octobre, le candidat du pouvoir, Jovenel Moïse, avait recueilli 32,76 % des voix, contre 25,29 % pour Jude Célestin, qui a qualifié ces scores de « farce ridicule ».
Si l’élection du chef d’Etat intérimaire sort Haïti de l’incertitude causée par le vide du pouvoir, la tenue, en moins de quatre mois, des scrutins reportés (le second tour de la présidentielle et des législatives partielles) s’annonce compliquée pour le pays.
Le conseil électoral provisoire (CEP), l’administration chargée de l’organisation des scrutins, doit être recomposé car 6 de ses 9 membres ont démissionné. Et former un CEP a toujours été l’occasion de tensions au sein de la classe politique haïtienne, l’opposition accusant toujours le pouvoir exécutif d’ingérence.
L’argent est l’autre handicap : le processus électoral, encore inachevé, a déjà coûté 100 millions de dollars, majoritairement financés par la communauté internationale.