Tribune.

 

Depuis début mai, l’évolution de la courbe des cas ne laisse plus de doute : Haïti va devoir affronter encore une fois la réalité de la mort contagieuse. Pour ne pas sombrer, l’île a besoin de la solidarité internationale.

Le début de l’épidémie de Covid semble avoir étonnamment préservé Haïti alors que la République dominicaine voisine est beaucoup plus durement touchée par le virus. Selon une première hypothèse, Haïti verrait pour la première fois de son histoire une épidémie longer ses côtes, et sa frontière avec la République dominicaine, sans s’engouffrer dans les immenses bidonvilles de Port-au-Prince, ni au plus profond des plaines, vallées et hauts plateaux qui relient les chaînes de montagnes du sud et du nord de l’île.

Dans les années 1980, le pays a dû faire face aux épidémies de diarrhée infantile qui était encore la première cause de mortalité des enfants de moins d’un an. Les décennies suivantes ont vu une autre épidémie, celle du sida, tuer près de 140 000 Haïtiens. Dans les années 2010, le choléra apparu après le tremblement de terre causa près de 10 000 morts. Pendant tout ce temps, la tuberculose continuait de faire des ravages, et seule la quasi-extinction du paludisme pouvait donner espoir.

A Haïti, pays de 11 millions d’habitants, les épidémies meurtrières se sont succédé à un rythme vertigineux et les Haïtiens ont appris que la «mort naturelle» n’existe pas. A Haïti, on meure toujours «à cause de». Et comme l’hypothèse que ce nouveau virus puisse épargner l’île serait un miracle auquel personne ne peut croire, le Covid-19 sera très probablement la cause des morts de demain. L’évolution de la fameuse courbe des cas et des morts depuis le début du mois de mai ne laisse plus de doute : Haïti, cette fois solidaire d’un drame planétaire, sait qu’elle va devoir affronter une fois encore la réalité de la mort contagieuse.

Tous acteurs d’un drame universel

Pour un pays si petit et si pauvre, l’avenir est d’une rare inquiétude. C’est que Haïti a compris que les Nations unies n’avaient jamais été aussi désunies, que chaque pays n’avait plus pour priorité que de protéger sa population et qu’il fallait désormais au peuple haïtien se préparer à ne pouvoir compter que sur lui-même. L’ironie est sévère : le Covid-19 nous rend tous acteurs d’un drame universel, de Paris à Port-au-Prince, et pourtant, les égoïsmes n’ont jamais été aussi féroces. Le vent de panique qui a recouvert la planète, nourri de nos inquiétudes personnelles et de nos peurs collectives, a parfois renforcé la solidarité «de proximité» mais il a exacerbé nos rivalités collectives.

Ce vent du nord qui a mené à la guerre des tarmacs entre pays riches pour détourner des avions de masques au prix de valises de billets, renvoie les pays pauvres à leur condition. Lorsque les pays européens rivalisent d’ingéniosité pour s’approvisionner au plus vite en tests biologiques, en équipements personnels ou en respirateurs, ils ne renvoient pas seulement un message sur ce que l’argent permet d’arrogance, ils rappellent aussi très concrètement aux pays pauvres que face à l’inquiétude universelle, la loi du plus fort, en l’occurrence la loi du plus riche, demeure.

 

[Lire la suite de l’article]

Normal
0

21

false
false
false

FR
X-NONE
X-NONE

/* Style Definitions */
table.MsoNormalTable
{mso-style-name: »Tableau Normal »;
mso-tstyle-rowband-size:0;
mso-tstyle-colband-size:0;
mso-style-noshow:yes;
mso-style-priority:99;
mso-style-parent: » »;
mso-padding-alt:0cm 5.4pt 0cm 5.4pt;
mso-para-margin-top:0cm;
mso-para-margin-right:0cm;
mso-para-margin-bottom:8.0pt;
mso-para-margin-left:0cm;
line-height:107%;
mso-pagination:widow-orphan;
font-size:11.0pt;
font-family: »Calibri »,sans-serif;
mso-ascii-font-family:Calibri;
mso-ascii-theme-font:minor-latin;
mso-hansi-font-family:Calibri;
mso-hansi-theme-font:minor-latin;
mso-bidi-font-family: »Times New Roman »;
mso-bidi-theme-font:minor-bidi;
mso-fareast-language:EN-US;}