18 Février 2009
Zone boisée unique de l’aire métropolitaine de Port-au-Prince, lieu de mémoire, poumon vert, le parc de Martissant comprend de nombreux arbres précieux et des espèces locales en voie de disparition. Avec sa verdure au milieu des masses de béton, il combine des atouts pluriels pour attirer des visiteurs d’ici et d’ailleurs. Un coup d’oeil sur l’état d’avancement des travaux de réaménagement.
« Vingt et un (21) gardes champêtres et des équipes d’entretien à l’oeuvre, création d’une »Zone d’aménagement concertée (ZAC) » ayant fait l’objet d’un diagnostic sociologique, des remparts en tôle érigés en attendant la reconstruction des pans de clôture », les travaux d’aménagement de l’espace dénommé »Parc de Martissant » par arrêté présidentiel en date du 29 juin 2007 sont définitivement lancés.
La directrice exécutive de la Fondation Connaissance et Liberté (FOKAL), Lorraine Mangonès, l’urbaniste Lucie Couet, le sociologue Michèle Oriol, deux animateurs sociaux et l’ensemble de l’administration de la FOKAL font partie également de cette grande équipe qui, de concert avec la mairie de Port-au-Prince et un consortium de quatre autres organisations non gouvernementales, doit conduire à terme ce projet.
Les principaux bailleurs du projet
L’Etat haïtien, l’Union européenne, l’ambassade de France sont les principaux bailleurs de ce projet financé aussi par la mairie de Port-au-Prince, la ville de Montréal et la FOKAL à travers la Open Society Institute, son principal bailleur basé aux Etats-Unis.
L’UE a supporté le projet à hauteur de un million d’euros. L’Etat haïtien, de son côté, a indemnisé les occupants des résidences et doit aussi dédommager les héritiers expropriés pour cause d’utilité publique. La FOKAL, lors d’une enquête conduite par une vingtaine d’enquêteurs, a déjà touché trente (30) mille personnes résidant dans la ZAC.
Un projet bien accueilli. Mais …
« Aucune agressivité n’a été enregistrée », souligne Mme Couet qui a quand même noté les pressions subies du fait que « tout le monde veut travailler » alors que le projet ne peut embaucher qu’un nombre limité de personnes.
Cent seize (116) résidents de Martissant âgés de 30 à 45 ans, dont une vingtaine de femmes, ont été recrutés pour faire partie d’un corps de gardes champêtres. Au terme d’une formation assurée par Global Security, qui a duré deux mois environ, vingt et un (21) d’entre eux, dont six (6) femmes, sont entrés en fonction, en attendant les autres.
Les propriétés concernées
A l’origine, cinq (5) propriétés déclarées d’utilité publique par arrêté présidentiel faisaient partie du projet. Il s’agit de :
• l’Habitation Leclerc (60 391,42 mètres carrés) ;
• la résidence de Catherine Dunham (26 642,78 mètres carrés) ;
• la résidence de Pauline Leclerc (3 328,94 mètres carrés) ;
• les propriétés Mangonès (42 569,46 mètres carrés) ;
• les propriétés Fongging (26 935,36 mètres carrés) (Nan Beny).
Cependant, pour le moment, l’une de ces propriétés (la résidence de Pauline Leclerc) est en litige et une autre (les propriétés Fongging) est squattérisée. Elles ne pourront pas intégrer le projet à ses débuts, a constaté Le Nouvelliste au cours d’une visite des lieux. Continuer >
Le Parc de Martissant et ses ambitions
Ce parc, d’une superficie de 17 hectares environ, doit accueillir, entre autres, une bibliothèque de lecture, un centre de recherches en sciences sociales, un jardin botanique orienté vers les plantes médicinales et des espaces pédagogiques.
Selon les responsables de la FOKAL, institution chargée de la coordination du projet, le Parc de Martissant doit également devenir un lieu de conservation et de valorisation de l’environnement haïtien, des espèces autochtones et importées.
« Le Parc de Martissant aura une dimension culturelle forte et sera un lieu de découverte de la nature pour ses visiteurs », explique la coordinatrice du projet, Lucie Couet, dans un document.
Redorer l’image du quartier
« Le projet »Parc de Martissant » est lié à une mobilisation citoyenne des gestionnaires de l’héritage de Katherine Dunham, nous rappelle Lucie Couet. Ses propriétés bâties font partie des premières construites à Martissant. Puis dans les années 1950, l’architecte Albert Mangonès est venu s’implanter avec sa famille dans la zone.
Le projet »Parc de Martissant » est un package global sur lequel viennent se greffer d’autres, dont la reconstruction de la rue Martissant 23, la réhabilitation de certaines écoles se trouvant dans la zone, le curage des canaux, le traitement des ravines, l’indemnisation des occupants des propriétés occupées illégalement par des sans-abri… Il comprend aussi la reforestation des espaces déboisés.
« De manière générale, une forêt a trois niveaux : un niveau au sol, un niveau intermédiaire et un niveau aérien, explique la coordinatrice du projet. Pour le moment, seul le troisième niveau existe réellement ». A partir d’avril 2009, des pépinières vont être mises en terre en vue de préparer les deux (2) niveaux manquants, confie Mme Couet.
Un rêve en passe de concrétisation
En attendant l’embauchage d’autres résidents, le projet commence, comme l’a souligné sa coordinatrice, « à changer l’image de Martissant » en proie récemment à des scènes de violence entre des bandes armées.
« C’est un moteur pour la réhabilitation urbaine, pour le changement d’image de la zone, pour la protection de l’environnement global. La porte est ainsi ouverte à d’autres partenaires qui voudraient s’embarquer dans ce projet ».
L’anthropologue et danseuse afro-américaine Catherine Dunham (1910-2006) a vécu une bonne partie de sa vie en Haïti. Elle avait toujours rêvé de faire de sa résidence et de celles avoisinantes un jardin botanique en vue, entre autres, de la préservation et de la conservation des espèces végétales et animales.
Pour sa part, l’architecte haïtien Albert Mangonès (1917-2002), voisin de Catherine, caressait le même rêve. Coïncidence ? Peut-être ! Leur rêve commun est, en tout cas, en phase avancée de réalisation.
Samuel BAUCICAUT
samuelbaucicaut@lenouvelliste.com
Parc de Martissant en chiffres
Création : 29 juin 2007 ;
Superficie : 17 hectares environ ;
Nombre de propriétés concernées : 5 ;
Nombre de visiteurs : 0 (le parc n’est pas encore ouvert officiellement) ;
Nombre de gardes champêtres formés : 116 dont une vingtaine de femmes ;
Nombre de gardes champêtres en fonction : 21 dont 6 femmes ;
Intervenants : 5 ONG (FOKAL, GRET, Concern Worldwide, Oxfam et AVSI), l’Etat hïtien, la marie de Port-au-Prince, la ville de Montréal ;
Bailleurs : 3 (l’Etat haïtien, UE, l’ambassade de France, OSI/FOKAL ;
Durée du contrat de la FOKAL avec l’Etat haïtien : 3 ans renouvelables ;
Montant du contrat : ?