Éloquent, un lycéen rafle des joutes oratoires à Petit-Gôave

Daël Othni Vincent, élève du nouveau secondaire IV au Lycée Faustin Soulouque de Petit-GôaveLa troisième édition des joutes oratoires de Petit-Gôave, « Des mots pour convaincre » s’est achevée cette année sous un signe particulier : le vainqueur Daël Othni Vincent ne peut pas se rendre en salle de classe depuis mi-janvier.

Depuis qu’une vingtaine de professeurs en provenance du Lycée Faustin Soulouque, foyer éducatif de Monsieur Vincent, ont pris l’initiative de réclamer des lettres de nomination et des arriérés de salaire remontant jusqu’à 2013, les responsables de l’institution ont observé avec désolation le désert qui s’installe dans les salles de cours de l’établissement ces trois derniers mois. 

Et l’année académique qui avance vers sa fin n’a pas pu égayer la conscience des différents protagonistes pour mettre un terme à la crise. Daël Othni Vincent, élève du nouveau secondaire IV, n’entendait pas se réjouir de ce sacre du dimanche 25 mars dernier sans porter sur les fonts baptismaux le problème auquel ses nombreux camarades font face depuis environ trois mois.

« Nous avons fait ce qu’ils n’espéraient pas, donc ils ont échoué », proclamait avec force de frappe le nouveau champion. Encouragé par la présence massive de la presse et du gratin de l’intelligentsia de la cité Faustin Soulouque, Vincent a enchaîné les uppercuts en pointant du doigt Jovenel Moise et Jack Guy Lafontant comme les premiers planificateurs de l’échec scolaire en Haïti, précisément à Petit-Gôave.

Personne ne pouvait l’arrêter dans ses diatribes, pas même l’euphorie des nombreux autres potaches qui délectent à cœur joie l’arrivée de cette palme après deux précédentes participations moribondes dans le concours « Des mots pour convaincre ». « Les portes de l’école devraient être fermées beaucoup plus tôt pour avoir des résultats », ironise-t-il devant un public acquis à sa cause.

Son venin envers les autorités du pays ne l’a pas privé d’affection pour Educ-Ha Group, jeune organisme promoteur de valeurs éducatives dans la commune. « Je pense que c’est une bonne initiative [le concours Des mots pour convaincre, ndlr] qui incite les jeunes à accorder beaucoup plus d’importance à l’école », explique le lauréat qui sait aussi jouer à la guitare basse dans "La chorale des échos-liés", créée par Educ-Ha Group.

« Ce concours permet aux élèves de prendre conscience de leur capacité à transmettre ce qu’ils pensent à partir des sujets qui dominent l’actualité », enchaine-t-il. Même son de cloche enregistré du côté d’Obed Lamy, journaliste de son état et coordonnateur d’Educ-Ha Group depuis sa fondation en 2016. 

« Le concours ‘Des mots pour convaincre’ cadre avec la Journée internationale de la Francophonie qui se déroule tous les 20 mars, chaque année. Nous accueillons des élèves dès la classe troisième jusqu’à terminale », explique celui qui a partagé son sens de professionnalisme avec le média en ligne Loop Haïti.

« Cette année, le concours a accueilli au total 8 écoliers issus des établissements de la ville [Petit-Gôave, NDLR]. Les matchs se déroulent en face à face comme au Parlement haïtien, et les candidats ont chacun 5 minutes pour exposer leur position autour d’un motif choisi au hasard par quelqu’un dans la foule, six pour entamer une discussion contradictoire et, enfin, deux autres pour faire la conclusion ».

« À la fin de chaque match, un jury évalue les performances de chacun à partir d’au moins cinq critères : Justesse de l’argumentation, réfutation de l’argument adverse, éloquence, respect du temps de parole imparti et bonne expression française », poursuit Lamy avant d’informer que le motif de la finale faisait un rapprochement entre le livre papier et le numérique qui, de plus en plus, prend une importance considérable dans la vie des lecteurs du monde entier. Il s’agissait de : « Avec Internet, on n’a plus besoin de livres dans les bibliothèques ».

« En plus d’un ordinateur portable, d’une tablette numérique, des dictionnaires, des livres, offerts à l’ensemble des candidats pour récompenser leur potentialité, les trois premiers lauréats recevront une bourse qui leur permettra de suivre un cours de français durant une session à l’Institut français d’Haïti (IFH). Chacun, ils repartent également avec une médaille qui scellera le souvenir de cette expérience unique et enrichissante », lit-on dans un communiqué acheminé à la rédaction de Loop Haïti.

« La 3e édition a été réalisée grâce au support de plusieurs institutions dont l’OIF, C3 Editions, Bibliothèque Municipale de Petit-Goâve, IFH, Le Lambi Night-Club ainsi que diverses personnalités locales et nationales ».


Les lauréats :

1er lauréat : Daël Othni VINCENT, Lycée Faustin Soulouque

2e lauréat : Eudes Biker LÉANDRE,  Collège Saint Antoine et Saint Ignace de Loyola

3e lauréat : Christina DORCINÉ, Collège Marie Dominique

4e lauréat : Fedorlensky Karlheinz FORVIL, Collège le Nouveau Monde