Au-delà des clichés, la vie à Cité Soleil
Par Amélie Baron
Article publié sur RFI.fr le mardi 31 décembre
L’image d’un pays pauvre et violent colle à la peau d’Haïti. L’histoire récente faite de troubles politiques, d’émeutes de la faim et de la lente reconstruction après le séisme prouve que la première République noire de l’histoire peine à trouver la voie de la démocratie. Mais il y a aussi une part de fantasmes qui entourent le pays et particulièrement son plus grand bidonville Cité Soleil. Cité Soleil, deux mots chargés de mythes pour ceux, en Haïti comme à l’étranger, qui n’y sont jamais allés.
Cette commune a été créée par François Duvalier dans les années 1970. L’idée du dictateur était d’avoir un village modèle pour accueillir les ouvriers des usines de sous-traitance qui venaient s’installer à Port-au-Prince. Mais l’afflux non maîtrisé de population venue des provinces a rapidement transformé la zone du bord de mer en immense bidonville.
Dans les dernières années de la dictature, Cité Soleil constitue, avec les autres quartiers défavorisés de la capitale, le fief politique de Jean-Bertrand Aristide. Suite au départ précipité du président surnommé Titid en février 2004, Cité Soleil devient le théâtre de violences politiques féroces. Le 30 septembre 2004 ses partisans lancent un mouvement sinistrement appelé opération Bagdad. Près de 2 000 personnes trouvent la mort durant l’année qu’aura duré cette opération Bagdad.
Avec les actions des casques bleus et le travail de la Commission nationale de désarmement, Cité Soleil a pu, au fil des années, retrouver un calme relatif. Mais fin 2013, les violences entre bandes armées connaissent une recrudescence dans la commune la plus pauvre d’Haïti. Et du même coup, les fantasmes faisant de Cité Soleil une zone de non-droit, un endroit duquel on ne peut pas sortir en vie, refont surface.
Au dernier recensement, en 2003, la population y était estimée à 360 000 personnes mais c’est une minorité qui s’entre-tue pour le contrôle du bidonville. Si les tirs résonnent au cours des nuits, la majorité des habitants de Cité Soleil vit chaque jour avec l’espoir de sortir de la misère.