L’ONU dénonce un racisme anti-haïtien en République Dominicaine
Le problème de l’immigration d’Haïtiens en territoire dominicain est un thème permanent dans l’île d’Hispaniola que se partagent les deux nations dont l’antagonisme remonte au XIXe siècle avec la libération de la République dominicaine en 1844 après 22 ans d’occupation haïtienne.
En République Dominicaine: un comportement raciste profondément enraciné
A la suite de leur visite de 7 jours en République Dominicaine, le représentant spécial de l’ONU pour la lutte contre le racisme, la xénophobie et l’intolérance, Doudou Diéne, et le représentant des questions de minorités, Gay McDougall, dénoncent dans un rapport préliminaire qu’ " {il y a un problème profond et bien enraciné de racisme et de discrimination vis-à-vis de groupes tels que les Haïtiens, les Dominicains d’origine haïtienne et, plus généralement, contre les Noirs, dans la société dominicaine}", selon l’agence Reuters.
Les autorités dominicaines crient au complot
Visiblement les relations des deux experts onusiens avec les autorités dominicaines ont étaient plutôt difficile. Dodou Diène souligne le fait que l’accueil qu’il a reçu en RP n’avait pas de précédent par rapport aux visites qu’il a effectuées dans d’autres pays. Il rapporte par exemple que "{Le troisième jour, le Sénat a adopté une résolution qui disait que ma visite et celle de Gay McDougall faisait partie d’un complot international contre la République dominicaine}". Et l’archevêque, chef de l’église dominicaine, a dit que toute recherche sur le racisme était irresponsable.
Une interprétation de la loi discriminatoire
Selon la délégation de l’ONU, la législation dominicaine n’est pas discriminatoire dans sa forme mais dans l’interprétation de ses lois, notamment en matière migratoire. La Constitution dominicaine offre notamment la nationalité aux enfants d’étrangers, nés dans le pays (à l’exception des enfants de diplomates), mais la Cour suprême de justice a exclu du champ d’application de cette loi les enfants d’immigrés illégaux. Cette décision, qui vise essentiellement les Haïtiens, avait été condamnée en octobre 2005 par la Cour interaméricaine des droits de l’Homme.
En conclusion, M Diène a invité fortement la République dominicaine à reconnaître l’existence du racisme et d’adopter des politiques pour le combattre.
Un problème déjà bien connu
Des ong et militants ont depuis longtemps identifié ce problème. Dès le mois de mars dernier Amnesty International avait dénoncé, dans un plaidoyer, l’existence d’une "discrimination ethnique enracinée" en République dominicaine contre les immigrants de Haïti et avait réclamé aux autorités d’arrêter les rapatriements massifs.
Lire le plaidoyer d’Amnesty International " [République dominicaine
Une vie en transit – La situation tragique des migrants haïtiens et des Dominicains d’origine haïtienne.->http://web.amnesty.org/library/pdf/AMR270012007FRENCH/$File/AMR2700107.pdf]"
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Extrait du rapport présenté à l’assemblée des Nations Unies le 7/11/12
http://www.un.org/News/fr-press/docs/2007/AGSHC3902.doc.htm
M. DOUDOU DIÈNE, Rapporteur spécial sur les formes contemporaines de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et de l’intolérance qui y est associée, a attiré l’attention de la Commission sur la recrudescence des phénomènes et des manifestations de racisme, de discrimination raciale et de xénophobie à travers le monde qui, selon lui, constitue aujourd’hui la plus grande menace contre la démocratie et l’harmonie des sociétés. Il a aussi précisé que la lutte contre ces phénomènes devait faire face à plusieurs tendances comme la recrudescence de la violence raciste et xénophobe, notamment son expression la plus grave, le passage à l’acte, avérée par un nombre croissant d’actes de violence physique et des assassinats prenant pour cible des membres de communautés ethniques, culturelles et religieuses. Une autre tendance est la banalisation politique et la légitimation démocratique du racisme et de la xénophobie, découlant notamment de la capacité des partis politiques prônant des programmes racistes et xénophobes d’obtenir des succès électoraux et d’être ainsi en position de mettre en application ces plates-formes au moyen d’alliances de gouvernements. Selon M. Diène, cette dernière tendance représente la menace la plus grave contre la démocratie et les droits de l’homme.
M. Diène a également souligné que la légitimation intellectuelle du racisme, de la xénophobie et de l’intolérance, se traduisait par le nombre croissant de publications dites scientifiques ou littéraires ou de déclarations publiques, qui sous couvert de la défense de l’identité et de la sécurité nationale, développent des théories et des concepts explicatifs marqués par la lecture ethnique ou raciale des problèmes sociaux, économiques et politiques. Il a placé dans ce contexte les récentes déclarations du prix Nobel de médecine, James Watson, dont les propos sur l’infériorité intellectuelle des personnes d’ascendance africaine et, en particulier, sa volonté implicite d’établir une hiérarchisation entre les différentes races, constituent une légitimation scientifique des stéréotypes historiques de construction du racisme et un recul majeur dans la promotion des droits des personnes d’ascendance africaine. Le Rapporteur spécial a également indiqué que le discours du président français à Dakar, le 26 juillet, s’inscrivait dans cette dynamique de légitimation du racisme.
La criminalisation et le traitement exclusivement sécuritaire des questions relatives à l’immigration, à l’asile, à la situation des étrangers et des minorités nationales, ethniques, religieuses et culturelles, qui ciblent les victimes principales du racisme figure aussi parmi les lourdes tendances énumérées par le Rapporteur spécial. À cet égard, il a déclaré que c’est dans ce contexte que s’inscrivent les propos de Kevin Andrews, ministre australien de l’immigration et de la citoyenneté, singularisant les ressortissants soudanais comme un groupe ayant des problèmes à s’intégrer dans la société australienne. En France, le récent projet de loi introduisant les tests ADN dans la procédure de traitement administratif des postulants au regroupement familial constitue aussi une illustration de cette stigmatisation de l’immigré. Parmi les autres lourdes tendances, il a cité la montée et la diffamation des religions et de la haine raciale et religieuse, de l’antisémitisme, de la christianophobie et plus particulièrement de l’islamophobie.
Face à ces tendances, a-t-il indiqué, des mesures urgentes, en profondeur et dans la durée, s’imposent. Dans ses recommandations, il met l’accent sur le caractère central de la volonté politique par le refus de l’instrumentalisation politique et électorale, le refus de la banalisation du racisme, de la xénophobie et de l’intolérance, et le combat systématique contre les plates-formes politiques racistes et xénophobes. Il a appelé à l’engagement renouvelé et à la mise en œuvre de la Déclaration et du Programme d’action de Durban, particulièrement dans le cadre de la Conférence d’examen de Durban qui se tiendra en 2009.
Il a ensuite parlé de ses visites en septembre dans les États baltes (Lituanie, Lettonie, Estonie) en expliquant que ses rapports sur ces trois pays s’articuleront autour du défi majeur de trouver un équilibre, dans des contextes historiques complexes, entre la continuité nationale et le respect des droits de toutes les minorités, notamment de la minorité russe. Concernant sa visite en République dominicaine, M. Diène a relevé que d’un côté, il y avait une négation de l’existence du racisme au niveau politique officiel et d’un autre côté, les minorités noires et autres, font fortement part des pratiques racistes dont ils font l’objet. La communauté d’origine haïtienne, par exemple, fait l’objet d’un certain nombre de pratiques discriminatoires, en particulier s’agissant de l’accès à la citoyenneté.
Il a précisé que son rapport tiendra compte de la nécessité pour la République dominicaine de reconnaître cette réalité, précisant que lors de son séjour, le Sénat dominicain avait adopté une résolution déclarant que sa visite et celle de Mme McDougal relevait d’un complot international, preuve selon M. Diène que la question du racisme est refoulée dans la société dominicaine, a-t-il conclu.