La mairie de Port-au-Prince fera-t-elle mieux que l’État central ?

L’arrêté de juillet 2013 de l’administration Martelly-Lamothe interdisant l’importation, la commercialisation et l’utilisation sous quelque forme que ce soit des sacs en polyéthylène et objets en polystyrène expansé (PSE, PS, ou styrofoam) n’a toujours pas donné de résultats en dépit de plusieurs tentatives des gouvernements successifs. Le dernier communiqué rappelant l’interdiction des produits en foam a été publié en janvier dernier et signé des ministres de l’Environnement (ME), de la Justice et de la Sécurité publique (MJSP), de l’Économie et des Finances (MEF), du Commerce et de l’Industrie (MCI). Un communiqué qui n’a ébranlé ni les commerçants ni les utilisateurs de ces produits qui continuent de constituer l’essentiel de nos déchets. Il suffit de jeter un coup d’œil à la ravine Bois-de-Chêne pour s’en rendre compte.

Face à cette situation, la mairie de Port-au-Prince, critiquée à tort ou à raison pour son incapacité à assainir la commune, a décidé de passer à l’action en interdisant, dans un arrêté communal en date du 16 mai, à tout individu ou à toute institution de déposer, d’empiler des déchets sur la voie publique ou dans des espaces publics non dédiés à cette fin. L’arrêté communal fait aussi obligation aux supermarchés et aux restaurants d’entreposer dans un récipient bien protégé les produits avariés, les déchets et tous autres éléments considérés comme rejets inutilisables ayant servi à la fabrication ou à la conservation de leurs produits; en faisant exigence à tout propriétaire d’activités commerciales susceptibles de générer des déchets, soit par leur personnel, soit par leur clientèle, de mettre des poubelles disponibles pour chaque surface de 4 mètres carrés de superficie.

Des spots publicitaires tournent en boucle sur des stations de radio pour informer la population de cette décision. Plusieurs jours après la publication de cet arrêté qui, selon la mairie de Port-au-Prince, est déjà en application, le visage de Port-au-Prince n’a pas encore changé. Les piles d’immondices gardent leur place habituelle, les gens continuent de jeter leurs ordures dans les rues en toute quiétude, les ravins et les égouts sont encore utilisés comme dépotoirs. Personne ne s’attendait à ce que la mairie fasse en une semaine ce que l’État n’a pas pu faire en des décennies. Il est cependant légitime de demander si l’arrêté du 16 mai n’est pas un arrêté de plus. On craint qu’il ne connaisse le même sort que celui sur les produits en foam.

L’arrêté de la mairie de Port-au-Prince était nécessaire. Il fallait dire assez aux entreprises privées qui déversent leurs déchets dans les poubelles publiques. Il fallait dire non aux marchands qui étalent leurs produits sur les trottoirs, puis jettent les ordures dans les égouts ou dans les ravins. Il fallait rappeler aux citoyens que la rue est le salon du peuple, qu’il faut la tenir propre. L’arrêté communal ne pourra pas à lui seul résoudre le problème d’insalubrité à Port-au-Prince, mais son application constitue un premier pas. Tous ceux qui sont fatigués de vivre dans cette capitale sale ont intérêt à soutenir la démarche de la mairie de Port-au-Prince.