L’ancien président haïtien René Préval est mort
Paru sur Le Monde
Proche puis rival de Jean-Bertrand Aristide, le « Florentin des Caraïbes » a marqué la vie politique haïtienne depuis les années 1990.
L’ancien président haïtien René Préval a été l’un des principaux acteurs de la tumultueuse transition démocratique depuis la fin de la dictature duvaliériste en 1986. Agé de 74 ans, « Ti-René » comme le surnommaient les Haïtiens du fait de sa petite taille, est mort, vendredi 3 mars, à son domicile de Laboule, dans la banlieue de Port-au-Prince. Discret, maitre du silence et de l’esquive, René Préval a été président de 1996 à 2001, puis de 2006 à 2011. Depuis la création de la première république noire il y a plus de deux siècles, il est le seul président à avoir accompli deux mandats sans finir en prison, en exil ou assassiné.
L’ancien président haïtien René Préval a été l’un des principaux acteurs de la tumultueuse transition démocratique depuis la fin de la dictature duvaliériste en 1986. Agé de 74 ans, « Ti-René » comme le surnommaient les Haïtiens du fait de sa petite taille, est mort, vendredi 3 mars, à son domicile de Laboule, dans la banlieue de Port-au-Prince. Discret, maitre du silence et de l’esquive, René Préval a été président de 1996 à 2001, puis de 2006 à 2011. Depuis la création de la première république noire il y a plus de deux siècles, il est le seul président à avoir accompli deux mandats sans finir en prison, en exil ou assassiné.
D’abord le « marassa » du président Aristide
René Préval et ses associés donnent du pain à « La famille c’est la vie », une association d’aide aux enfants de la rue créée par un jeune prêtre, Jean-Bertrand Aristide, connu pour ses prêches enflammés contre les duvaliéristes et l’impérialisme américain. Une forte amitié se noue entre les deux hommes. Elu président en décembre 1990, Jean-Bertrand Aristide nomme René Préval, son « marassa » (jumeau en créole), premier ministre en février 1991. Après le coup d’Etat militaire du 30 septembre 1991, René Préval se réfugie à la résidence de l’ambassadeur de France, avant de rejoindre M. Aristide en exil à Washington. Après le débarquement des troupes américaines qui ramènent M. Aristide au pouvoir à l’automne 1994, René Préval prend la tête du Fonds d’action économique et social.
En décembre 1995, M. Aristide n’appuie pourtant que du bout des lèvres la candidature de René Préval à la présidence. Elu avec 88% des suffrages, le président Préval tente de mettre en œuvre le programme négocié par M. Aristide et la communauté internationale. Mais des organisations populaires et des parlementaires proches de M. Aristide sabotent ce programme qu’ils qualifient de « plan néolibéral dicté par les puissances étrangères ».
Alors que M. Aristide tente de prendre le contrôle de la jeune police, les relations entre les deux hommes ne cessent de se dégrader. Très proche conseiller du président Préval qu’il pressait de se démarquer de son ancien marassa, le journaliste Jean Dominique est assassiné en avril 2000. Lorsque Jean-Bertrand Aristide revient au pouvoir en 2001 dans des conditions contestées, René Préval choisit de s’éloigner, à Marmelade, un bourg du nord d’Haïti, berceau de sa famille, où il développe des plantations de café, d’agrumes et de bambous.
Hébété par le séisme de 2010
Réélu en 2006, René Préval doit faire face à la violence des gangs et à une grave crise économique. Des « émeutes de la faim » provoquent la destitution de son premier ministre Jacques-Edouard Alexis et une longue crise politique. Fin 2009, la situation semble s’améliorer. René Préval, « le florentin des Caraïbes », comme l’a surnommé le professeur brésilien Ricardo Seitenfus, a signé des accords de coopération avec Cuba et le Venezuela tout en maintenant de bonnes relations avec Washington. L’ancien président américain Bill Clinton, nommé envoyé spécial du secrétaire général de l’ONU pour Haïti, annonce des investissements étrangers. Le terrible séisme de janvier 2010, qui fait plus de 200 000 morts et dévaste la capitale, anéantit ces espoirs. René Préval, qui a échappé de justesse à la mort, est hébété. Faible avant le séisme, l’Etat haïtien est décimé.
Face au déferlement chaotique de l’aide internationale et ses innombrables ONG, René Préval sera accusé, parfois injustement, d’avoir manqué de leadership pour conduire la « refondation d’Haïti ». Acculé, il ne pourra résister aux fortes pressions d’une partie de la communauté internationale conduite par la secrétaire d’Etat américaine Hillary Clinton qui élimine son dauphin Jude Célestin de la course à la présidence et ouvre la voie à l’élection de son successeur le chanteur Michel Martelly (2011-2016).