Introduction
En prélude à la journée internationale des prisonniers, fixée par l’Organisation des Nations Unies (ONU) au dernier dimanche du mois d’octobre et à l’instar des quatre (4) dernières années, le Réseau National de Défense des Droits Humains (RNDDH) a décrété le mois d’octobre 2006, mois des prisonniers. En ce sens, l’organisation a mis sur pied cette année, de concert avec la Direction de l’Administration Pénitentiaire (DAP) et le Comité Central Mennonite (MCC), toute une série d’activités. Ces dernières s’inscrivent dans le cadre d’un plaidoyer autour de la problématique de la détention préventive prolongée sous le thème : « Prizonye gen Dwa pou yo jwenn Jistis, Fòk Pizonye jwenn Jistis »
Le présent rapport relate les différentes activités réalisées et prend en compte la situation juridique des détenus et leur condition de détention.
à l’occasion de la Journée internationale des Prisonniers
A l’occasion de la Journée internationale des Prisonniers, qui a été célébrée le 25 octobre 2006, la Commission Nationale Justice et Paix a répondu à l’invitation de la Direction de l’Administration Pénitentiaire (DAP) pour organiser quelques journées de formation pour les détenus au plus grand centre de détention dans le pays, qui est le Pénitencier national. La formation se déroulait autour des droits et devoirs des détenus. Nous avons échangés avec les détenus sur des thèmes comme : la dignité inviolable de la personne humaine, n’importe ses conditions de vie ou les actes qu’elle a pu commettre ; les relations qui doivent exister entre le détenu et son avocat, entre le détenu et son juge, entre le détenu et le personnel pénitencier. Plus de 200 détenus ont participé à au moins une journée de formation et de réflexion sur ces thèmes.
La Commission salue le DAP et la Direction du Pénitencier national pour cette initiative. Pendant ces 5 jours, nous avons mieux compris l’engouement des détenus pour s’exprimer, pour qu’on les écoute, pour qu’ils puissent dire leurs idées et exprimer leurs frustrations. La Commission salue les détenus du Pénitencier national qui ont participé à ces journées, qui se sont exprimés, qui nous ont écouté et qui ainsi ont permis une réflexion fructueuse sur la vie en détention.
La Commission a constaté et entendu les différents problèmes rencontrés par les détenus et qui ne respectent pas leur dignité humaine. Ainsi il y a les mauvaises conditions de vie, de logement et de sanitation ; trop de personnes sont abritées dans un espace trop aigu qu’est le Pénitencier national ; la détention préventive prolongée en est un autre toujours. Mais les détenus sont victimes d’autres humiliations toujours. Comment vivre en détention pendant plusieurs mois et même des années, sans être appelé par le juge chargé de l’enquête, sans qu’aucune instance judiciaire ne se prononce sur votre cas ou semble s’intéresser aux conditions de votre détention ? Arrêter un citoyen et restreindre sa liberté dans des conditions carcérales est un acte extrêmement grave qui exige des motifs graves. Les juges doivent bien s’en rendre compte. Les avocats aussi doivent comprendre qu’il s’agit de personnes humaines. La liberté d’une personne humaine n’est pas une marchandise à acheter, à vendre ou à négocier n’importe comment.
En plus des injustices infligées aux détenus de la part de l’Etat, des juges et des avocats, en plus des conditions de vie contraires à la dignité de la personne humaine subies par les détenus, les plus grandes frustrations et souffrances proviennent du sentiment d’être oubliés par l’Etat, l’appareil judiciaire, la société et même parfois sa propre famille.
A part quelques condamnés, la grande majorité des détenus resteront en détention pendant un temps limité seulement. D’ailleurs, le Pénitencier national n’est pas en état pour recevoir des prisonniers pour une période trop longue. Nous l’avons entendu et pu constater, le Pénitencier national ne prépare pas la réinsertion des détenus dans la société. Un séjour là-bas conduit plutôt au ressentiment et à la révolte ; au lieu qu’il permettrait aux détenus d’acquérir de nouvelles connaissances et compétences ou une décision pour contribuer à la construction du pays.
En dépit de ces mauvaises notes, nous avons entendu comment bon nombre de détenus rêvent d’un pays qui finalement serait bien organisé, de façon que tous ses enfants puissent y vivre ; pour qu’il y ait éducation et développement, la paix et réconciliation entre tous les fils et filles de ce pays.
Pour la Commission Justice et Paix, l’expérience permet de mieux saisir qu’il y a toujours de bonne volonté et des forces de changement dans ce pays, même là où on ne l’attendrait pas. Notre intention n’est nullement d’encourager l’impunité ; au contraire, la Commission le répète que tous ceux qui commettent de la violence envers l’autre ou bien qui violent leurs droits doivent répondre de leurs actes : Cela aussi est une exigence de notre dignité comme personnes humaines.
La Commission encourage la DAP et la Direction du Pénitencier national en particulier pour continuer à marcher le chemin de la formation avec les détenus. La Commission encourage tous ceux qui rêvent d’un pays meilleur, où tous cherchent à s’entendre par des chemins corrects, sans que personne ne cherche à détruire ou éliminer l’autre.
De son coté, la Commission s’engage à donner plus d’espace dans ses activités de la défense de la dignité et des droits à la visite des prisons et à l’assistance judiciaire aux détenus.
Père Jan Hanssens, directeur