Menaces de mort, malveillance sur les réseaux sociaux, la Covid-19 tourne au calvaire pour des malades en Haïti. Soins et prévention y deviennent plus difficiles. Une situation aggravée par la méfiance vis-à-vis des autorités, et qui pourrait rappeler les pires moments de l’épidémie de choléra.
 

Le calvaire d’un pasteur

Même guéri du coronavirus, Burel Fontilus n’ose plus rentrer chez lui. Il dort chez des amis sûrs, et change de domicile régulièrement. Sa crainte : être retrouvé par des agresseurs potentiels. Le  pasteur de 42 ans a confié son inquiétude : "J’ai reçu des menaces. Mais ma femme m’avait protégé des appels. Toute la population de Carrefour s’est entendue pour me tuer." Des vigiles armés de son quartier de Carrefour, à Port-au-Prince, auraient menacé de le lyncher.
 

Emballement des réseaux sociaux

Au départ, la rumeur s’est développée, affirmant qu’il répandait négligemment le virus, après l’avoir contracté lors d’un voyage d’affaires, hors de la capitale. "Je n’avais toujours pas le résultat positif du test médical. Tous les réseaux sociaux savaient que j’étais malade. Ils m’ont accusé de circuler et de propager la maladie. Alors tout le monde me regardait, peut-être pour me lyncher dans la rue. J’ai abandonné mon voiture et j’ai vu un pap-pa-dap (bus) vide qui passait. Je l’ai pris et suis rentré à la maison."

Même Edouard Pierre, le maire de Carrefour, a initialement jeté de l’huile sur le feu, suite à de fausses informations prétendant qu’un homme infecté fuyait les autorités. Sur Twitter il conseillait aux habitants de faire attention. Avant de faire amende honorable, deux jours après, présentant Fontilus comme un "pasteur honnête qui n’a jamais eu de mauvaises intentions". L’édile a assuré à Reuters qu’il avait ensuite envoyé des voitures de police assurer la sécurité autour du domicile de Burel Fontilus, jusqu’à ce qu’une ambulance puisse l’emmener à l’hôpital pour traitement.
 

Faiblesse des institutions

Face à cette situation, le président Jovenel Moïse a déclaré récemment que le gouvernement ne tolèrerait pas la violence contre les malades du coronavirus. Mais aux yeux des Haïtiens, l’Etat semble trop faible pour arrêter les auteurs. Son autorité a été minée par la criminalité incontrôlée des gangs, la corruption et l’insécurité alimentaire. La peur de la Covid-19 est donc bien plus forte que la confiance dans les institutions…


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